Examen de la réforme des retraites au Sénat : un combat sans relâche de la gauche et des écologistes, malgré une censure des débats par tous les moyens

, le 23 mars 2023.

Après un examen raté à l’Assemblé Nationale, le texte sur la réforme des retraites a démarré le jeudi 2 mars au Sénat.

Avec le groupe Ecologiste, Solidarité & Territoires, et l’ensemble des groupes de gauche, nous nous sommes toutes & tous mobilisés pour combattre cette réforme injuste, injustifiée et qui répond d’abord à une logique comptable et productiviste.

Nous avons déposé 964 amendements dont de nombreuses propositions en faveur des femmes, des plus précaires, et pour une meilleure prise en compte de la pénibilité.

Mais, tout au long de l’examen de ce texte, soit 12 jours de débat, le Gouvernement, allié à la droite sénatoriale, a décidé par tous les moyens règlementaires et constitutionnels possibles de contraindre et de corseter le débat parlementaire.

Malgré tout, nous avons réussi à proposer de nombreuses pistes de financement au projet injuste du Gouvernement :

– Cotisation exceptionnelle sur les super-profits des entreprises réalisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires,

– Cotisation exceptionnelle sur les dividendes,

– Taxe additionnelle de 10 % des bénéfices des entreprises qui proposent des fonds de pension à leurs salariés plutôt que des augmentations de salaire,

– Contribution de la richesse produite par les caisses automatiques,

– Conditionner les exonérations de cotisations patronales au respect d’objectifs sociaux et environnementaux : pas de délocalisation, l’égalité salariale ou encore une stratégie bas carbone.

Sur la question des régimes spéciaux : alors que le gouvernement tend à les stigmatiser et les remettre en cause, nous pensons qu’au contraire, ces régimes protègent les salariés. Nous devons les sauvegarder et les étendre a bien d’autres métiers via une prise en compte accrue de la pénibilité. 

Le mardi 7 mars, jour de mobilisation historique partout en France où environ 3.5 millions de Françaises et de Français ont défilé dans toute la France pour dire non à cette réforme injuste, nous avons examiné ce jour-là le fameux article 7, qui concentre le cœur des injustices de cette loi par le report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite.

Mon intervention en séance sur l’article 7

Mais nous avons assisté en séance à un coup de force anti-démocratique de la part de la majorité sénatoriale :

En effet, après avoir usé d’outils légistiques contraignants pour accélérer la discussion et écourter les explications de vote, le rapporteur LR du texte, René-Paul Savary, a déposé un amendement de réécriture de l’article 7, faisant tomber une grande partie des amendements que nous avions déposé avec les autres groupes de gauche, et qui n’ont pu donc être examinés.

Même les nombreux sous-amendements que nous avons déposé par la suite ont tous été rejetés par la commission des affaires sociales, car jugés « irrecevables ».

Des procédés anti-démocratiques que nous avons dénoncés à maintes reprises !

Après avoir brutalisé le débat parlementaire, et malgré nos demandes inlassables de retirer ce texte, la droite sénatoriale a voté l’article 7, qui consacre donc la confiscation des deux meilleures années de retraites des travailleurs.

Nous avons été consternés par l’attitude de la majorité sénatoriale, qui, tout au long de l’examen du texte, est resté mutique pendant les débats, sourde aux arguments de bon sens que nous leur soumettions et à nos nombreuses propositions de financement, insensible à l’ampleur de la mobilisation des français.e.s.

Par cette attitude déplorable, la droite méprise le Parlement, les partenaires sociaux et nos concitoyennes et nos concitoyens, dont l’opposition ferme et constante à cette réforme n’est plus à démontrer.

Au cours de l’examen du texte, nous avons également souhaité rappeler au Gouvernement que ceux qui ont creusé le déficit des caisses de retraite c’est eux ! Alors qu’ils répètent partout que ce déficit est dû à un déséquilibre démographique, la vérité est un plus complexe. Le déficit des caisses de retraites est la cause d’une situation démographique certes, mais cette « bosse démographique » qui résulte de l’arrivée à la retraite de toutes les générations du baby-boom est temporaire et se résorbera après 2030. Le Gouvernement Jospin avait anticipé la chose en instaurant le Fond de réserve pour les retraites qui devait permettre de financer les surcoûts de la période 2020 – 2030 mais dont les recettes ont été sabordées par la réforme Fillon de 2010. La situation de nos caisses sociales et de nos caisses de retraites a ensuite été aggravés par les centaines de milliards d’euros de cadeaux fiscaux aux entreprises effectués depuis 2013 et massivement depuis 2017. Ce sont leurs choix budgétaires qui nous ont mené dans cette situation.

Alors qu’avec les autres groupes de gauche,  nous dénoncions une à une les fausses mesures d’accompagnement de la réforme promises par le Gouvernement et le rapporteur LR du texte, la droite sénatoriale a encore utilisé des manœuvres de procédures pour court-circuiter les débats sur l’article 8 relatifs aux carrières longues et sur l’article 9 qui contient quelques mesures relatives à la pénibilité, à la marge.

Puis, le Gouvernement, allié une fois encore à la droite sénatoriale, a décidé d’utiliser l’article 44.3 de la Constitution, c’est-à-dire le vote bloqué, pour nous empêcher de débattre de la fin du texte.

Cet article a pour effet de réduire drastiquement le temps de parole des sénateurs et des sénatrices jusqu’au vote final du texte.

Les amendements que nous avions déposés sur les articles restants pouvaient être défendus, mais pas débattus, ni votés. L’examen du texte s’est donc conclu par deux journées de simulacre de débat où nous présentions dans le vide des amendements qui n’étaient pas soumis au vote du Sénat. Une situation absurde, au mépris là aussi de la démocratie parlementaire !

Tout au long de l’examen du texte, l’action conjointe du Gouvernement et de la droite a empêché le Sénat de débattre de ce texte dans de bonnes conditions. En usant et abusant de procédures légistiques, elle a porté ainsi une double atteinte, à la justice sociale et à la démocratie.

Le samedi 11 mars, le Sénat a finalement voté le projet de loi par 195 voix pour et 112 voix  contre.

Mon explication de vote

La suite nous la connaissons, Emmanuel Macron craignant de ne pas réunir une majorité suffisante à l’Assemblée nationale, a préféré empêcher le vote par l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution. Un passage en force qui ne résout rien et démontre la faiblesse du Gouvernement. Une motion de censure transpartisane déposée par le groupe LIOT a été déposée à l’Assemblé, rejetée à seulement 9 voix près.

Mais le combat continue ! Avec les autres groupes de gauche au Parlement, nous avons déposé un Référendum d’initiative partagée sur la réforme et nous avons saisi le Conseil constitutionnel. Le combat continue également aux côtés de l’intersyndicale, jusqu’au bout, pour le retrait de cette réforme injuste et brutale.

 

Présent lors des nombreuses manifestations parisiennes, avec mes collègues parlementaires