Retour sur le budget 2024 : injuste socialement et largement insuffisant pour la transition écologique !

, le 1 décembre 2023.

Intervenant dans un contexte inflationniste marqué, le projet de loi de finances pour 2024 proposé par le Gouvernement, était, cette année encore, largement insuffisant, ne répondant ni aux enjeux sociaux qui fracturent notre pays, ni aux défis climatiques auxquels font face nos territoires.

Car, si le gouvernement met en avant un “budget vert” avec l’extinction progressive de plusieurs niches fiscales encourageant les énergies fossiles, les moyens sont encore loin d’être suffisants pour une transition écologique réellement efficiente, dans les domaines du transport, du logement, de l’agriculture, ou des services publics…

Concernant son volet territorial, le gouvernement confirme la direction prise ces dernières années à savoir priver les collectivités de ressources vitales et revaloriser les transferts financiers qui leur sont destinés en dessous du niveau de l’inflation, ce qui équivaut à des coupes budgétaires.

Conformément à notre engagement d’être force de proposition, avec mes collègues sénateurs et sénatrices écologistes, nous avons souhaité défendre à travers nos amendements une vision territoriale, pragmatique, écologiquement réaliste et socialement juste.

Malgré quelques victoires, par exemple sur la création indispensable de places supplémentaires d’hébergement d’urgence, la pérennisation de l’expérimentation Territoires Zéro Chômeurs de Longue Durée ou la création d’un “fonds territorial climat”, ce budget reste bien en-deçà des besoins du pays, n’apporte rien pour plus de justice fiscale et sociale en répondant toujours à une logique libérale, et revient à un budget de réaction face à la crise sans anticiper ni s’inscrire dans une vision globale de long terme. Nous avons donc voté contre.

Nous pouvons également nous interroger à nouveau sur le sens de ces trois semaines de débat alors que le recours au 49-3 à l’Assemblée nationale permet au Gouvernement de récupérer seulement les propositions qui l’intéressent. Une pratique qui affaiblit considérablement le rôle du Parlement et érode notre vie démocratique.

Cette année, en tant que chef de file pour la mission « Agriculture », j’ai souligné que cet exercice budgétaire, à bien des égards, ne nous satisfait pas.  Certes, une augmentation de 17% du budget est bienvenu, on reconnaît l’importance des enjeux agricoles, mais l’orientation de ces dépenses ne répond pas aux priorités que nous défendons : la transition agricole, la qualité de l’alimentation, un revenu digne pour les paysans, et des politiques publiques pour l’accompagnement à l’installation transmission. L’ensemble des solutions agroécologiques et paysannes sont insuffisamment soutenues par ce budget.

Nous avons particulièrement insisté sur le sous-financement de l’agriculture bio et des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC). J’ai déposé des amendements pour une augmentation des moyens qui leurs sont alloués, ils ont malheureusement été rejetés.

Les crédits de paiement pour les MAEC baisseront de 35 % par rapport à 2023, alors que les budgets actuels sont déjà insuffisants pour honorer les contrats signés. Par exemple, en Bretagne, le budget pour 5 ans est de 90 millions d’euros, alors que les besoins estimés s’élèvent à 150 millions d’euros.

Sur les haies un engagement à 110 millions est acté, mais aurons-nous uniquement de la plantation d’arbre sans prendre en compte le devenir de ces haies et leur gestion durable ? Aurons-nous des plantations d’arbres avec des essences locales ? Nous n’avons pas de garantie sur ces points cruciaux.

Mon intervention lors de la discussion générale pour la mission « Agriculture »

Pour ma part, j’ai déposé 19 amendements. Parmi eux, j’ai notamment réitéré des demandes effectuées les années précédentes, qui n’ont toujours pas été satisfaites : des moyens bien plus importants pour l’ONF, un fonds d’urgence pour la bio, l’augmentation du budget dédié à l’aide complémentaire jeune agriculteur, l’augmentation du plafond du CASDAR, ou encore plus de moyens pour l’Agence bio dont le travail de communication est crucial pour la valorisation des productions biologiques.

J’ai également déposé un amendement pour expérimenter une « sécurité sociale de l’alimentation » : c’est à dire la mise en place d’un fonds pour financer et évaluer des expérimentations locales de sécurité sociale de l’alimentation. Concrètement, cela se traduirait par une allocation mensuelle distribuée et permettant de se nourrir dans des lieux conventionnés, pour des produits sains, écologiques et de qualité. Cela permet d’agir à la fois sur le revenu des agriculteurs, la relocalisation, et la justice sociale. Si cette disposition n’a sans surprise pas trouvé de majorité au Sénat, nous continuerons de faire vivre cette mesure dans les prochains mois par d’autres véhicules législatifs.

Au final, avec les orientations choisies par le Gouvernement, en favorisant l’agriculture intensive et l’agrandissement des fermes, le laxisme face aux défis de la régulation foncière, nous déplorons cette année encore une occasion manquée pour porter de vraies mesures en faveur de l’agroécologie, cet outil de transition indispensable aux mutations qui permet de combiner la souveraineté alimentaire et la juste rémunération des agriculteurs avec l’adaptation et l’atténuation du défi climatique.